Pas personne qui va me convaincre de faire ça à l'année longue.
J'vas gagner moins cher, mais calvaire, jvas vivre chez nous, pas dans un char.
Tout ça pour dire qu'on avait un rendez-vous à Pital Lasalle à huit heures du matin.
Pour une échographie, histoire de voir comment ça se passe dans cette bedaine, vu que chose a pas l'air pressé d'en sortir.
Comme Fiston à l'époque, d'ailleurs.
Finalement, y avait pas de trafic.
On est arrivé 10 minutes en avance, y avait seulement deux femmes.
Faut dire qu'à chaque fois qu'on va là, c'est minimum quatre heures d'attente, même si on a un rendez-vous.
Faque, on se fait un lunch, des ti-cossins à grignoter, des jouets pour le plus vieux pis on attend.
Cette fois-ci, on a battu des records.
On a attendu en tabarnac.
On en a vu du monde passer dans salle d'attente.
Ça roulait.
Nous autres on restait là.
Une femme arrive avec sa fille de 7 mois, sa mère et sa sœur enceinte.
Une discussion enflammée entre elles s'en suit:
—Areuuuueuoillle gaaaaaaa!
—En tout côs les filles à jôb ont commencé à prendre des gôjures sul sexe du bébé d'une des filles dla job.
—Y dmendront pô lsexe?
—Yahiiiiigneueueue!
—T'a peu mon trésôr
—Ben non, y dmendront pô lsexe, sont spicial un peu.
—Ben lô, sa bidaine est comment?
—Pointu mais un peu sul large pareil...
—Un gâh!
—Ben non, sul large st'une fille!
—Ça dépends!
—Gazouiiiiiuouougneeeu
Elles ont fini par passer.
On est resté assis à attendre.
Une autre famille est entrée.
Trois enfants, une mère agressive/impatiente, un père soumis.
Ils en veulent un quatrième.
Z'étaient déjà pas mal bruyants pourtant.
—Mackenzie, come back right here! Leave that right there, do this RIGHT NOW!
Je suis sorti dehors avec fiston à la recherche d'un parc, il méritait bien ça, y avait pas dit un mot de travers et ça faisait déjà un bon deux heures qu'on attendait.
On est revenu une heure plus tard, Douce était plus dans la salle d'attente.
L'était dans une autre salle d'attente, pour un TRL, écouter le coeur du bébé, checker les contractions, blabla.
Anyway,
On est sorti de là y était deux heures moins quart.
On a quand même eu le bonheur d'être crissé sul cul par la baboune du bébé.
En sortant on a décidé de faire un détour sur Marie-Anne, au coin de Messier, manger un burger comme y en a pas ailleurs.
Ça faisait un bail que j'y était pas allé, rapport que le chum qui restait là est rendu ailleurs, loin.
Ça l'air de ça asteure:
Pas certain que ça va lui redonner le gout de revenir tant que ça.
Vers la fin du repas, une fille entre, s'assoit à la table à côté de nous.
Banale.
Jusqu'à ce que la serveuse lui demande si elle est prête à commander.
«Ben là, j'attends keukun!»
Pas banale.
Pas bête non plus, juste, hmm, chiante un ti-peu.
La porte s'ouvre, un homme entre en courant presque.
Il porte une longue boite de carton qui semble contenir un parasol, une grande affiche, banderole ou un autre objet de
Il dépose la boite sur la table, elle dépasse d'un bon trois pieds, et se met à parler sans arrêt.
Il la place, la replace, tentant de s'en accommoder, hésite, semble se demander comment il va réussir à manger avec ça sur la table.
La fille, sans dire un mot, saisit la boite et la dépose par terre, sous la table.
Le type n'a pas arrêté une seconde de parler.
—Saluuuuuut! Ça va?ouin,eillejtedisqueçalâchepastrophein???T'asturéussiàrjoindreMatis
pourlelocaldemain?
—Allo! Vous voulez le menu?
—Saluchépastrop! Kessquevousavezquisefaitvitevite?
Untisamouicheunesoupetêteben?
—Moui, on a la soupe du jour, crème de poireau, sinon, ben, on à la guédille.
—OUIlagueudillecébon!
—D'accord, sra pas ben long...
—Eillecélfun! Stassébonunegueudille!
—Cé quoi une guédille au fait?
—Ohlagueudillesfâpaslongtempsquejemangeçô, lô. J'aicommencéçôenGaspésie, stuassezbeaulaGaspésie!
Il avait deux accents, le gai et celui du Lac.
Ça m'a frappé parce que, il me semble, et ça se confirme avec les gais que je connais, le gai ne veut pas avoir l'air provincial.
La province ne veut pas de lui, pourquoi devrait-il en conserver l'accent?
—BonfèkelôlôlôtumedisqueyavaitpluslebleuDVSpisqu'yvoulait
pasqu'onprennentlebleuroyalpasky l'ontpris su unautreprojetladernièrefouais?
—Ouan, c'est ça qu'y arrive icitte, tu fais le tour vite de Montréal.
C'est rare que ça m'arrive, mais, aussitôt que je l'ai vu entrer, j'ai eu le gout de le filmer, l'enregistrer pour ensuite tout retranscrire, pour que sa vie devienne un exemple de ce que cette hostie de machine peut faire à une âme, qui à la base, devait être ben correct.
Il me rappelait trop de gens que je côtoyais dans d'autres vies.
Du monde ben correct, mais complètement enduit du paraitre de ce milieu, qui en deviennent bêtes, froids, superficiels, cons. Des gens qui te donnent du «c'est quoi ton ti-nom déjà?» comme s’il n'y avait pas de lendemain. Tout ça en répondant sans cesse au cellulaire.
Sa soupe arrive.
Il la mange.
Sa guédille arrive, il cherche de la place, n'en trouve pas sur sa table.
Je suis concentré sur les notes que je prends, j'essaie de suivre son rythme.
Le crayon-feutre de fiston me fait des gros traits au fond de la main, je vais avoir de la misère à relire ça...
Il dépose son bol de soupe devant moi, sur ma table.
Parce que je suis son ami?
Parce que j'ai l'air de m'en aller?
Je le regarde, pour voir s'il va s'excuser.
Il m'ignore complètement.
Vraiment, faudrait le filmer.
Ou je pourrais le suivre et noter tout ce qu'il dit!
Dommage, cette envie de chier qui me tenaille m'oblige à rapailler les petits et partir.
J'en rencontrerai surement encore des comme ça anyway.
Un autre tantôt.
4 commentaires:
Comme c'est l'fun d'attendre le p'tit nouveau en te lisant!
Toujours ben ça de pris!
Héhé!
woah... tu parles pas souvent, mais quand tu t'y mets, c'est pas reposant non plus! :0)
Faque? Y'é arrivé ou pas, le p'tiot?
Pas encore de ptiot.
Je retourne dans mon mutisme.
J'attends.
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