C'est l'histoire d'un texte inédit qui comportait un titre qui n'a pas plu à la bande à Mouébiuche.
Ça pourrait être comique, vu la raison donnée pour le refus, trop vulgaire, trop de sacre, mais ça me fait pas rire tant que ça, vu que moi aussi j'écris des sacres vulgaires, pis que tout le monde sacre vulgairement, tsé, faque, non, c'est pas comique tant que ça.
On imagine ça, au comité de lecture:
« Un propos intéressant noyé dans les sacres et la vulgarité »
Bien sûr.
C'est certainement pas parce que c'est en joual. Naaaah.
Je suis certain que ça les allume l'idée de remettre en cause nos origines « pures laines bleues de Franfffe » et de ramener sur le tapis l'évidence de notre métissage. Oh oui.
Ça parle des curés en plus, tout pour plaire à cette joyeuse bande d'ecclésiastiques.
Ils ont surement trouvé ça intéressant malgré tout parce que, qui dit sauvage dit chaos non ordonné, dit non productif qui travaille pas qui rapporte rien, qui empêche de tout crisser à terre en paix pis tsé, les artisses, on est dmême un peu itou, tsé, faque, c'est bon, tsé, ça brasse, le monde va aimer ça.
Non.
Le texte est trop vulgaire.
Y a trop de sacres dedans.
Ben câlisse. Est bonne.
Comme si on était cave...
Faque, le vlà, le texte qui devrait être dans le prochain numéro sur les sauvages.
Avec les sacres pis ljoual pis toute.
Kwey, Butch!
TEXTE INÉDIT QUI COMPORTE UN TITRE
Un gars qui écrit des livres m'a laissé entendre que j’pourrais publier un texte inédit qui comporte un titre dans la revue Mollusque, une revue de littérature toé chose.
C'est un numéro thématique sur les Sauvages. Hostie, j'en suis un. Ça tombe bien.
Ça fait qu'après m'être gratté la tête une couple de fois, j'me su's dit que j'pourrais ben torcher un p'tit que'que chose pour Mollusque.
D'abord, mon père disait qu'i' était pas un Sauvage pis qu'les Bouchard v'naient d'la Normandie.
Fuck, i' v'naient même pas d'la Normandie les Bouchard! I' v'naient comme i' pouvaient quand l'occasion s'présentait. Pis i’ d’vaient v’nir souvent parce qu’i’ étaient dix-neuf enfants du côté d’mon père.
La mère de mon père était une Sauvage, une Algonquine ou, comme on dit à c't'heure, une Anishnabé. A v’nait d’la réserve d’Oka. Le père de mon père a grandi à deux miles de Métis-sur-Mer. Pis du côté d’ma mère, c'est pareil. Des descendants d'Acadiens métissés de Micmacs qui vivaient à Sainte-Clothilde-de-Horton su' l'bord d'la track, comme des Gitans.
Nous autres, des Bouchard d'la Normandie? Christ de joke de curé, oué... D'la christ de marde. On nous a pâlis maudit calvaire de pompier sale! Comme si on était des Juifs sous l'occupation allemande, en France, en 1944. Pâlis pour notre bien, bien sûr. Pour ne pas passer pour des hosties d'Sauvages. J'm'appelle pas Simon Ben Gourion mais François Dupont! J'm'appelle pas Makwa Grizzli mais Gaétan Bouchard!
Ces hosties de curés-là ont toutte faitte pour crisser ça dans 'a tête de mon père, qu'on n'était pas des Sauvages, mais des chevaliers de la table ronde, avec une fleur-de-lys dans l'cul.
Tabarnak! On a gardé de nos racines que le paillard français qui a trempé sa bite dans 'a p'lote de nos grands-mères. Maudit christ de saint-cibouérisation d'calice!
Ça fa' qu'un m'ment d'nné e'j'me su's dit qu'c'était assez. Toutte disait que j'étais un Sauvage. C'était écrit dans ma face saint-chrême, dans 'a face de mon père, de mes frères, de ma mère, de mes ancêtres. On était des Métis calice! Pis on l'est d'venu, avec des cartes toé chose pis toutte le kit.
Mon pays, c'était encore l'hiver. Mais c'était aussi l'île Mékinak, l'Île de la Tortue. Pis j'me su's mis à comprendre plein d'affaires sur moé et mon pays. D'abord que je ne savais rien de Saint-Laurent et Saint-Maurice. Comme tout le monde autour de moé. C'qui fait que j'ai rebaptisé mes noms de lieux : le fleuve Magtogoek, la rivière Métabéroutin, pis toutes sortes d’affaires de même. Pis ça fait juste commencer. C'est pas fini. Christ que non c'est pas fini.
J'me suis mis aussi à écouter les arbres. Fuck, c'est pas d'ma faute, mais nous autres les Sauvages on sait qu'i’ nous parlent, les arbres, les roches pis toutte le reste, juste parce que c'est comme ça. Nous sommes animistes, ouais. On pense qu'i' a d'la vie dans toutte. C'est ben dur à comprendre ça, hein?
Moé, les arbres me parlent. Pis i' m'disent crissez-nous don' patience tabarnak!
-Arrachez pas mon écorce torrieu! Fendez-moé pas en quatre pour rien! Wo! Menute! J'su's pas tout seul là-dedans... J'fais vivre des oiseaux, des moénaux, des pas beaux... Toutes sortes d'affaires de même... Christ! Wake up!
Ouin, ouin. Les arbres me parlent. Pis si j'peux prendre une feuille de moins, j'va's l'faire. Pour être en parfaite symbiose avec le Grand cercle de la vie.
Ça se pourrait donc que mon texte ne soit pas publié dans Mollusque pa'ce qu'i' faudrait que j'leu' z'envoie une version imprimée par courrier postal, aux éditions Diptyque, à l'adresse de j'sais p'us trop qui, à Monrial. C'est sûr que j'f'rai pas ça.
Moé j'aime trop les arbres pis ça m'tente pas d'imprimer ça sur papier quand toutte se fait si simplement de nos jours par les voies électroniques. Hostie on n'est plus au temps des mandarins. C'est pas des rapports à doubles interlignes que j'fais, mais d'la littérature.
-Hostie d'Sauvages! qu'i' vont s'dire en r'cevant mon texte. Faut toujours qu'i' fassent chier en plus qu'i' savent pas boire!
Ben oui, ben oui.
Vous vous attendez à quoi, que j'vous liche le cul?
No way.
J'su's un Sauvage hostie.
Wou-wou-wou-wou-wou-wou!
Makwa Grizzli
Alias Gaétan Butch Bouchard
5 commentaires:
Ce texte va finir par être le plus connu de ce numéro sans y avoir été !
:0)
Je pense que ça ne fait pas l'ombre d'un doute.
Y avait yenk!
Ça me semble naturel qu'un Sauvage soit backé par sa Tribu, héhé.
Wou-wou-wou-wou-wou-wou!
LYES!
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