jeudi 27 mai 2010

Un sac au vent

C'était un regard qu'on n'oublie pas.
Plein de douleurs, implorant de l'aide.
Je voyais bien qu'il ne pouvait pas faire grand-chose, clopin-clopant, ralenti par ce sac de plastique accroché sur lui,
se dirigeant tout droit sur le boulevard Côte-Vertu,
ignorant les centaines de voitures y passant chaque minute.

J'ai détourné les yeux, sachant qu'il allait sans doute mourir dans les instants suivants, profitant d'une accalmie j'ai traversé les six voies du boulevard sans regarder derrière.

J'allais régler un cas avec un gestionnaire de condos où je n'avais plus accès, les serrures ayant été changées.
Tout le long de la rencontre, l'homme tentait de me faire la conversation dans le but de me faire oublier la lenteur de son ordinateur.
— Srâ pas long là, faut yenk que jrente dans lsystème.

Je revoyais en boucle ses yeux m'implorant de l'aider.

Je suis sorti du Condo gériatrique, sondant l'autre côté de la rue, essayant de le repérer, à travers les chariots fous et leurs vrombissements incessants.

Je l'ai aperçu alors que je traversais, à nouveau en courant, profitant d'une autre accalmie.
Il était bien aplati sur l'asphalte.
Son sang était déjà sec tellement il avait était écrasé à répétition.
Seul le sac qui était accroché à son aile battait encore au vent.

Avoir été en hiver, avec mes gants, j'aurais peut-être pu l'aider,
mais en pleine chaleur, mains nues, ce n'était pas les conditions
idéales pour manipuler un pigeon blessé, étrangement ligoté par un sac d'épicerie.
Quand même, ce regard...

7 commentaires:

piedssurterre a dit…

Quel texte Gom !
Aussi beau que ton regard sur ce triste monde.

Mek a dit…

Neuf fois sur dix, la petite âme vient de se réincarner en gros con qui s'achètera un camping car.

s.gordon a dit…

Texte très touchant Gom.

Seul le sac qui était accroché à son aile battait encore au vent.

Pis ça c'est beau en sivouplaît.


É : (rires sonores)

gaétan a dit…

maudites autos!

Miléna a dit…

J'aime tellement ça quand tu écris! TU me fais ramollir, tsé avec tes histoires tristes et ta manière de dire les choses qui ne ressemble à personne. J'aime ça en maudit, entendre ta voix.

Gomeux a dit…

Gratias, tous, toutes!

Éléonore a dit…

C'est encore la faute à la pollution :(

Aujourd'hui j'ai trouvé des bonbonne de propane dans mon étang à canard ! stie que le monde est con !